Les Ateliers Agora organisent du mardi 22 janvier au samedi 09 février 2019, une exposition sur le thème « Le corps révélé ».
Objet de tous les fantasmes et désirs, sujet de fascination des artistes depuis des temps immémoriaux, le corps est mis à l’honneur aux Ateliers Agora. Pourquoi le corps ? Le corps de l’autre, homme ou femme, le corps miroir n’a cessé, au cours
des millénaires, d’être réinventé, re-dessiné : corps physique de l’athlète, du chasseur, corps mental mystique, corps glorieux, corps sensuel et fécond de la compagne, corps d’enfant, que tant d’artistes ont sacralisé comme la première innocence révélée, corps vêtus ou dévêtus, armés ou désarmés.
Dans l’art le corps est une notion incontournable, en effet il n’y a pas d’art sans corps. Il y a autant de corps qu’il y a d’artistes et de spectateurs, la rencontre physique est nécessaire et obligatoire que ce soit entre l’artiste et l’œuvre qu’entre le spectateur et l’œuvre.
Aujourd’hui le corps est considéré dans sa fragilité et sa viscéralité contrairement aux modèles antiques anciens, les artistes cherchent un moyen d’aller au-delà de la représentation du corps « parfait ». Le corps est « un moyen d’expression puissant de l’expérience vécue », il se prête à diverses techniques possibles, du dessin à la performance, il offre aussi de nombreuses
possibilités aux artistes pour jouer un éventail de rôles.
Soir de vernissage:
Texte de vernissage:
« Narcisse avait pour habitude de se mirer dans l’eau, lui dont le corps était paraît-il si beau. Imaginez un peu si découvrant son reflet il s’était trouvé nez à nez avec l’image d’une gorgone, il en eut été sans doute médusé. De là l’idée que Narcisse admirait son visage absolument parfait, car laid, il se serait hâté de se désaltérer afin de ne point rester là, languit, sans volonté. Pour autant, il se raconte que dans les faits, le problème de Narcisse n’était pas fondamentalement sa beauté mais son identité : il ne sait pas qu’il se voit ou alors, il ne sait pas que ce qu’il voit est le corps qui lui sert de transport. Il se plait, il aime celui qui n’est ni tout à fait un autre, ni tout à fait lui-même et perdu dans ses pensées, se noie. On dira qu’avec un tel empressement à s’admirer, il ne l’a pas volé ! Or, un corps n’est pas là que pour être désiré. Il entrave parfois sérieusement nos efforts. Pensons donc à ce pauvre Achille ! Pourquoi a-t- il donc fallut qu’il ait un talon ? Imaginez donc le nombre d’exploits dont la nature nous a privés au nom de quelques contingences anatomiques. Icare, pauvre homme, eut beau battre des ailes, il fut aspirer vers les flots à cause d’un corps trop lourd pour les airs. La belle affaire, « quand on veut, on peut » nous dit l’adage populaire. Miltiade parcourut 42 kilomètres au pas de course afin d’annoncer aux Athéniens la victoire. Croyez-vous qu’il en fut récompensé ? Point du tout. Son corps, lâche, s’écroula à l’arrivée et il mourut sur le coup ! On n’est jamais trahi que par les siens me direz-vous. . Aussi, je vous prierai ce soir de faire très attention. Car il se raconte discrètement chez les hellénistes lettrés que ce qui tua Narcisse ce n’est pas tant sa beauté que l’illusion, l’image labile d’un corps qui n’est que de l’eau mais dont il ne peut se détacher. C’est ce regard direct qui le fige. Donc, soyez discrets et pour contempler ce sein que vous désirez voir, jeter un regard oblique, pour ne point vous pencher trop sur l’eau noire du Styx.
Je vous souhaite une très bonne soirée. »
Béatrice Hermesdorf